Le Sith s'était isolé une fois de plus. Une longue séance de méditation était au programme, et il ne comptait pas sortir de sa cabine avant le jour suivant. Il avait choisi dès le départ de Coruscant une cabine assez spacieuse, dont il avait fait retirer la plupart des objets de décoration ou de "confort superflu", ne gardant que la couchette et de quoi s'occuper de son hygiène. Le reste, il n'en avait que faire. Il n'avait pas besoin d'ordinateur, de tableaux, de photos, de sculptures... Dormir, se laver, et la Force, tout cela lui suffisait déjà amplement.
Il avait verrouillé la porte, afin de n'être dérangé par personne. Il avait aussi donné des directives au personnel navigant. Rien ne devait venir troubler sa retraite. Il avait retiré son manteau noir, ainsi que le haut de son habit et ses bottes, ne gardant que le pantalon. Assis sur ses talons, à même le sol, les yeux fermés, Oxious se laissait porter par la Force.
Il La sentait parcourir son corps, fourmillant dans ses veines, le long de ses nerfs, à chaque souffle dans ses bronches et ses poumons. Il se laissait envahir par Elle. Bientôt, il perdit les sensations dans chacun de ses membres. Tout son corps devenait engourdi. Il avait l'impression que seul son esprit restait là, en veille, ouvert à chaque chose qui se passait dans cette chambre, dans cette coursive, dans le vaisseau entier.
Il se sentait voyager à travers l'espace et le temps, et pourtant il avait parfaitement conscience qu'il n'avait pas quitté sa cabine. De nouveau, le passé et le futur se mêlaient, sans indication sur l'un ou sur l'autre. Des visages apparaissaient, certains connus, d'autres non. Des bribes de phrases lui arrivaient, sans qu'il puisse vraiment distinguer leur sens. Puis il sentit qu'autre chose se passait. La Force avait changé soudainement. Il sentit l'Obscurité tomber sur lui comme une chape de plomb, une telle puissance maléfique qu'il n'en n'avait jamais ressenti, pas même lorsqu'il était un Padawan ébahi par l'aura obscure de son Maître.
Le voile noir de la Force Obscure l'entoura, de plus en plus épais. Il n'arrivait plus à s'arracher à sa contemplation, il ne voulait plus qu'une chose : découvrir ce que le Force avait à lui montrer. Et il vit.
Brusquement. A peine une fraction de seconde. Sans doute moins, mais il avait perdu la notion du temps. La vision avait été extrêmement brève, mais elle avait marqué son esprit. Le visage d'une femme, une humaine, ou une espèce y ressemblant fort. Elle avait le visage très blanc, comme exsangue. Son regard était étrangement vide, et il était difficile de dire si c'étaient ses yeux qui ne dégageaient rien, ou si elle n'avait simplement plus d'yeux. Il n'eut pas le temps d'en voir davantage qu'elle avait déjà disparu, le laissant dans le noir le plus complet, dans le froid et le silence. Une voix se fit entendre, comme lointaine, et pourtant très claire.
Peur, Agonie, souffrance, faîtes demi-tour...
Pour finir, la voix retentit un instant, et s'éteint, puis plus rien. Le vide. L'obscurité se dissipa rapidement, comme balayée par un vent de réalité. La volonté de Darth Oxious était en train de le ramener dans sa cabine. Il sentit de nouveau ses jambes, ses pieds, ses mains, ses bras, son corps entier, tout en fourmillements et en picotements. Puis il repoussa petit à petit la présence de la Force, jusqu'à l'occulter presque entièrement.
Lorsqu'il ouvrit les yeux, le zabrak voyait encore par moment le visage cadavérique. Il ne savait pas s'il s'agissait d'un avertissement qui concernait l'expédition ou non. C'était possible qu'il ne faille pas s'en préoccuper, mais son Intuition lui intimait le contraire. La présence d'un autre Sensitif dans la mission ne devait pas être le fruit du hasard, et il fallait en avoir le coeur net. Ce Rafael Eridan avait-il lui aussi la sensation étrange qu'il avait depuis le début ? Il devait savoir.
Oxious se leva d'un bond, se rhabilla en hâte et sortit en coup de vent. Sur le seuil, il s'arrêta net. Pas un bruit. Tout le monde devait dormir. Il entra de nouveau et consulta le moniteur près de la porte. Il dispensait de nombreuses informations, comme la date, l'heure, la température, le temps de vol écoulé, le temps de vol restant, et bien d'autres encore. Il avait été absent près de deux jours ! C'était le petit matin, et tout le monde dormait encore, mis à part les quelques membres d'équipage qui avaient écopé de ce quart. Il ne pouvait pas dormir, la Force ne l'avait pas épuisé physiquement, au contraire. Il se sentait plus reposé et dispos que jamais. Mais psychiquement, il était trop tendu pour prendre le moindre repos. Il décida de monter en salle d'entraînement, histoire de se défouler un brin.
Il s'empara de ses gantelets et sortit dans la coursive. La mise en garde retentissait dans son esprit, en retrait mais bien présente, comme une alarme silencieuse dont on ne peut ignorer les flashes lumineux. Fébrile, il gagna l'élévateur pour se rendre en salle d'entraînement.