Chroniques de Laryn Kre'fey et Koth Melan, livre I, Chapitre I.
Nul n’ira jusqu’au fond du rire d’un enfant.
8 ans avant l'avènement de l'Empire. 14 Helona. 9H17 du matin.
Les yeux d'un petit garçon Bothan de six ans semblaient découvrir le monde pour la première fois, il jouait dans les collines de Kothlis avec sa nourrice, devant les yeux amusés de ses parents. Déjà, le petit Bothan sautait partout et aimait épier les gens qu'il rencontrait, parfois c'était un ouvrier traversant les prairies, parfois un soldat monté qui surgissait, l'armure rutilante. Ces guerriers là étaient les Protecteurs. Des Bothans respectés, sages, tous centenaires, maîtres dans l'art du combat. Autrefois, ils avaient travaillé pour le Bothan Spynet et parcouru la Galaxie. Désormais, ils veillaient au bien de leur peuple. Les regards se portaient toujours sur ses hommes, mais une crainte s'emparait des esprits des adultes lorsqu'ils voyaient ce froid intérieur qui régissait le coeur de ces guerriers de l'ombre. Peu de gens les avaient vu se battre, mais on leur attribuait des pouvoirs mystiques. Racontars de bistrot. Le garçon quand à lui, n'avait jamais eu peur, il s'approchait, observait le majestueux destrier, puis celui qui le montait. Il y à déjà plusieurs mois, cette rencontre inhabituelle avait eu lieu, et le regard perçant du Protecteur s'était posé sur lui, il l'avait fixé, et le garçon lui avait rendu son regard. Le sage avait du être décontenancé, mais il n'en avait rien montré, il avait relevé la tête et avant de partir, avait dit au jeune Kothlissien.
- Continue à marcher, car la route est longue sur le chemin de l'éternité.
Le garçon n'en avait pas conscience, mais sans doute que lorsque cette phrase ressortirait des tréfonds de son âme un beau jour, cela changerait sa vie. En tout cas, en ce matin d'été, chaud et sec comme le blé, la vie du garçon n'avait pas changé.
Un convoi arrivait des collines, la stupeur des parents, la peur, cette peur soumise à des sentiments d'infériorité incontrôlés. Il fallait rentrer. Mais le garçon n'était pas de cet avis. Le convoi s'était arrêté quelques centaines de mètres plus loin, sur une grande étendue plate. Les fleurs et les buissons délivraient leur senteur à l'état brut, un enivrement physique et mental époustouflant. Le corps absorbait toutes ses effluves qui se mêlaient petit à petit à celles de la gastronomie déposée artistiquement sur cette nappe sans fin, blanche, écrue, tissée à la main. Une explosion des sens traversaient l'esprit de ceux qui existaient ici. Des serviteurs préparaient de grandes tables et s'affairaient à toute sorte d'activités laborieuses tandis que sortait d'un attelage un petit Bothan. Un autre. Lui aussi paraissait vivre depuis seulement quelques heures. Il allait partout, voguait alentour, empreint d'une expression joviale inestimable. Épié par les yeux attentionnés des serviteurs et les rires de ses géniteurs, il était libre, libre de vivre, de vivre libre.
Les yeux. Ceux du premier petit Bothan, le premier de cette histoire. Ces yeux, les siens, n'avaient rien perdu de cette gaieté qui éclaboussait autour de ces gens là. La richesse, la noblesse, les classes. Tant de notions aussi abstraites qu'inconnues pour ce premier là. Et lui aussi voulait jouer comme cela. Son cerveau avait commandé à ses jambes instinctivement de s'élancer à la poursuite l'une de l'autre, il se jetait dans cet océan d'amusement qui lui tendait les bras, le sourire aux lèvres.
Mais c'était déjà trop tard, un serviteur avait arrêté ce jeune défroqué qui tentait de se mêler à eux. Il le tenait par le devant et exerçait une force trop forte pour le garçon qui battait désespérément des pieds dans le vide, tendait la main. Attraper ce qui n'était pas à sa portée, aller plus loin, continuer à marcher.
Pendant ce temps, le petit noble serpentait à travers ses amis adultes qui étaient tous tournés vers la colline. Deux Bothans dévalaient la pente de toute la force de leur jambe, une femme se tenait en haut de ce tumulus naturel, scrutant la scène. Plus le jeune Bothan avançait, plus les jambes se faisaient nombreuses et plus sa progression s'en trouvait réduite. Finalement, il arriva à une clairière, la forêt de jambes se tenait derrière lui. Devant le jeune Bothan, le serviteur Grendu tenait un autre lui. Les yeux un peu plus clairs peut-être, mais il lui ressemblait bien. L'éphèbe avança de ses petits membres jusque devant son alter-ego. Il le dévisageait, touchait ses joues, ses cheveux. Puis il attrapa la main molle qui pendouillait du bras droit, et la secoua vigoureusement, comme pour en faire tomber les fruits.
Le serviteur qui avait soulevé ce gêneur regarda étonné son jeune maître avant de reposer au sol le petit Bothan. Les deux enfants se regardèrent longuement, leurs mains valsant de haut en bas à de nombreuses reprises, devant les yeux attentifs des adultes autour. Les parents qui avaient dévalé la pente herbeuse attendaient, essoufflés, que le duo finisse ses présentations pour s'excuser. Un silence plutôt stressant avait crispé les acteurs muets de ce choc de deux classes opposées, si lointaines l'une de l'autre.
Finalement, le petit garçon aux yeux plus sombres et à la fourrure la moins rêche décida que ce ballet avait fait son temps, et osa les mots pour exprimer son respect envers ce nouvel être fascinant qu'il découvrait. Il avait en tête toutes les choses fabuleuses qu'ils pourraient faire ensemble, à jouer, à vivre. Ses lèvres s'entrechoquèrent et quelques syllabes s'extirpèrent de sa gorge de chérubin.
- Je m'appelle Koth Melan'ylya, et toi?
Laryn. Laryn Kre.
Dernière édition par Koth Melan le Dim 15 Juil 2012 - 15:12, édité 1 fois