[EVENT GCG]Les temps changent... [Alliance]

Deltooine, dans le secteur Deltooine. Monde moyennement peuplé, moyennement industrialisé, moyennement agricole. Deltooine avait, pour ces raisons précises, été désignée pour recevoir la réunion top secrète entre les dirigeants de la toute nouvelle Alliance Rebelle et la très puissante autorité du Secteur Corporatif. Bien sûr, les cinquante-cinq membre du Direx n'avaient pas fait le déplacement. Trois émissaires avaient été désignés volontaires pour prendre contact et entamer ce que chacun espérait être des négociations fructueuses. Et on avait choisi des pointures.
Le premier était un Muun. Dak Tris. Comme tous les Muun, Dak Tris était grand, filiforme, avait un cerveau surdéveloppé de petites dents pointues, des yeux enfoncés dans leurs orbites. Il s'habillait en robe tissée dans les étoffes les plus nobles et ses mains dotées de longs doigts osseux et crochus relevaient plus de la serre que de l'outil préhensile humanoïde. Directeur de Standards Assurance Inc. , Dak Tris était craint et respecté au sein du Direx, et pour cause : Il en était le membre le plus riche, le mieux payé, et le plus impitoyable.

A Ses côtés: Kendral Noros et Semak Gep. Kendral était un humain. Directeur Général du Starsend Consortium, un important conglomérat industriel spécialisé dans la chimie et la recherche para médicale, il faisait figure au sein du Direx de conscience collective. Nul ne savait si les activité de son entreprise en était la cause, mais l'homme avait tendance à se montrer d'un laxisme que Dak Tris trouvait intolérable concernant les mesures sociales prises par ses entreprises. En vérité, Kendral Noros n'était pas plus philanthrope que les autres, mais un certain cynisme lui avait permis de comprendre que les décisions les plus difficiles à faire accepter demandaient parfois de savoir caresser l'adversaire dans le sens du poil.

Le troisième larron, Semak Gep était le PDG de Data & Stocks Inc. Né sur Céréa et doté comme tous ses congénères d'un cerveau Binaire, Semak avait fait fortune dans les communications. De tous les membres du Direx, il était sans doute le moins apprécié. Il avait été touché par diverses affaires de moeurs, dont une dans l'une des plus sordide dans une suite de l'un des Casinos de la compagnie RenStar. Son entreprise, Data & Stocks avait également une réputation déplorable après qu'une regrettable affaire de corruption et d'écoutes illégales d'honnêtes négociants, dont deux membres non-permanent du Direx soit venue l’entacher. Pourtant, le réseau d'influence tissé par Semak Gep était tel qu'il avait désormais le pouvoir de faire plier les législations des mondes du Secteur Corporatif à ses exigence. Concurrence déloyale, entente sur les prix, intimidations et bien d'autres, telles étaient les méthodes du Céréen, tout ceci cachée sous des apparences impeccables. Cinquième fortune du Direx, il avait été choisi pour faire partie de la délégation de Deltooine pour son âpreté à la négociation. Il avait accepté à contrecœur, se refusant presque à poser le pied sur Deltooine, qu'il n'estimait pas digne de lui.

Cette fine équipe, accompagnée par leurs collaborateurs habituels attendait donc désormais les dirigeants de l'Alliance au nom de l'Autorité du secteur corporatif...

La Délégation Rebelle était enfin arrivée. Un spatioport privé, propriété de Kendral Noros lui avait été alloué, et le discret croiseur Gozanti put se poser à l'abri des regards dans une baie d'amarrage spécialement réservée. Lorsque tous les systèmes du vaisseaux furent à l'arrêt, une large porte blindée s'ouvrit au fond de la baie. Dans son encadrement, les trois silhouette des pontes du Direx se dessinaient. Au centre, Dak Tris dominait de sa haute taille. Ce fut d'ailleurs lui qui prit les devants, lorsque Mon Mothma et ses collaborateurs descendirent de leur croiseur. Eh oui. Même le plus riche des Muun savait se montrer courtois lorsqu'il recevait des invités de marque. Et dans la conception Muun, courtois ne signifiait pas nécessairement agréable.

[Dak Tris]-Bienvenue dans le système Deltooine, Sénatrice Mothma. Nous sommes ravis de constater que vous n'êtes pas resté sourde à notre appel.

Le Muun avait employé le titre de Sénatrice à l'égard de la Chandrillienne. Un titre qu'un fonctionnaire impérial zélé aurait eu tôt fait de rapporter comme une marque de subversion à l'égard du tout puissant Empire Galactique.
Le Muun salua rapidement les divers conseillers et accompagnateur de la figure de proue de l'Alliance Rebelle, et indiqua, de son long bras osseux le chemin à suivre. Il était hors de question de s'attarder dans une baie d'amarrage aussi luxueuse soit-elle, pour parler du futur de la galaxie. La troupe se mit donc en marche vers les bureaux prévus pour le déroulement de la réunion, le chemin serait l'occasion de démarrer la discussion.

-Sénatrice Mothma, reprit le Muun de sa voix d'Outre-tombe. Le Direx, que mes collaborateurs et moi même représentons aujourd'hui, est en émoi. Un rictus ironique vint barrer le visage de Tris, découvrant une rangée de dents impeccablement limées en pointe. Ou du moins sujet à une certaine... agitation. Et vous en êtes la cause la plus directe. Vos petits tour de passe-passe n'ont pas manqué d'attirer l'attention du Direx. S'en prendre à des centres de communication en plein noyau ? Détruire des usines d'armements, s'en prendre à Kessel ? Votre petite organisation fait preuve de beaucoup d'audace, Sénatrice Mothma. Une caractéristique que nous autres, les entrepreneurs apprécions tout particulièrement.

Le Muun ne s'était pas départi de son sourire, mi-taquin, mi-méprisant. Telle était l'une des caractéristiques fondamentales du patron de Standards Assurance. Ne jamais révéler à son adversaire, et encore moins à son allié ce qui se tramait dans son esprit, et mieux encore, faire passer le mépris le plus profond pour de l'arrogance naturelle. Car oui, Dak Tris méprisait Mon Mothma. Elle ne devait pas posséder le millionième de sa Fortune, et son rang de Sénatrice n'était rien comparé à la colossale puissance financière que le Muun était capable de mettre en branle pour réaliser ses projets et balayer ses adversaires d'un revers de manche. Pourtant, cette minable petite humaine se trouvait être la pièce qui manquait à Dak Tris pour réaliser ses objectifs. Du moins, le pensait-il.

-La Déclaration Officielle de Rébellion a même fait sursauter parmi nos collaborateurs les plus téméraires. Se dresser contre l'Empire, vraiment Sénatrice Mothma, il fallait oser. D'autant que, pour ce que j'en sais, votre petit pavé dans la marre a eu plus d'effet que vous ne l'escomptiez. Mygeeto, mon propre monde d'origine, Taris, et même Utapau se sont joints à votre petite réunion. Comme c'est touchant. Et ceci, sans compter sur vos soutiens déjà antérieurs. Corellia ? Ithor ? Naboo ? Haha, nous n'aurions jamais cru que votre sympathique rassemblement, votre "amicale de la démocratie", comme nous aimions à l'appeler ici réussirait à obtenir tant d'influence, sur tant de systèmes. Et c'est là que se pose notre problème. Le vôtre, et le nôtre.

La Délégation arriva enfin aux bureaux, ou plutôt à une immense salle de travail dotée de tout l'équipement dernier cri. Des rafraichissements avaient été prévus en quantité : les négociations risquaient d'être longues. Tout le monde put prendre place autour de la table. Dak Tris, encadré par Noros et Gep reprit la parole, assis dans le siège doté du dossier le plus haut.

-Nous allons donc pouvoir passer aux choses sérieuses, et, il sera désormais inutile d'user de votre diplomatie, ou d'employer des circonvolutions de discours. Nous n'avons pas beaucoup de temps, et l'efficacité sera notre maître mot. Le Muun adressa un regard entendu à l'humain et au Céréen avant de reprendre.
-Vous vous en doutiez peut être, le Direx ne vous a certainement pas fait venir jusque dans le système Deltooine pour vous... féliciter de vos petites victoires. Vos prouesses militaires ne nous impressionnent pas, et ne sont pas l'objet de notre rencontre du moins, pas pour le moment. Si le Direx nous a envoyé à votre rencontre, c'est pour proposer à vous et à votre Alliance pour Restaurer la République un Marché.
Le Mot était lâché. Marché. La table était une table de négociations. Dak Tris et ses deux compères étaient des négociateurs, et Mon Mothma aurait pu mieux tomber en la matière. Kendral Noros prit alors la parole.
[Kendral Noros]-Le Marché est simple, sénatrice Mothma. L'Alliance est désormais en guerre, et comme vous le savez, l'argent en est le nerf. De son côté, le Direx voit d'un très mauvais œil le contrôle que l'Empire exerce sur lui, via un ExO directement "proposé" par l'Impératrice. Le Direx n'apprécie pas que le pouvoir central vienne se mêler de ses affaires. La République à laquelle vous tenez tant s'en souvient très certainement. Un faux sourire creusa les fossettes des joues de Kendral Noros, tandis que Semak Gep haussait un sourcil dédaigneux. Je pense, Sénatrice Mothma, que vous percevez déjà le point où nous voulons en venir.
En un mot comme en cent une Alliance plus puissante représente potentiellement un intérêt plus grand qu'un Empire Stable mais envahissant. Le "deal" est donc le suivant. Le Direx s'engagerait à fournir le soutien du Secteur Corporatif dans sa totalité à l'Alliance, Et en retour, celle-ci se montrerait nettement plus... compréhensive envers les attentes de celui-ci quant à sa capacité à gérer ses propres affaires en interne. Loin de tout gêneur étatique. Une coopération sur le long terme, bénéfique aux deux parties. Sous réserve de quelques petits... engagements, cela va de soi...

La base des négociations était donc posé. Le Direx cherchait à se débarasser du pouvoir Impérial, et dans un certain sens, cet objectif convergeait parfaitement avec celui de l'Alliance Rebelle. Pourtant, il était fort peu probable que les requins du Direx se limite à ce genre d'accord de principes arrangeant à priori tout le monde. Et quand on mettait le doigt dans l'engrenage qu'était le jeu à somme variable des corporations du Secteur, on n'était jamais sûr de pouvoir le récupérer....

Jim avait observé tranquillement les premières passes entre les leaders des deux délégations. Il connaissait de nom les trois personnages envoyés pour négocier avec l’Alliance Rebelle. Semak Gep était tristement célèbre pour avoir fait la une de nombreux journaux télévisés au sujet de ses frasques personnelles comme des affaires douteuses qui courraient autour de son entreprise. Kendral Noros était celui des trois que le corellien connaissait un peu mieux et respectait le plus des trois, son collègue à la tête de la Corellian Chemical Corporation, filiale de la compagnie Chiewab représentée au Direx lui en avait un peu parlé avant la visite vu qu’ils travaillaient dans la même branche. Sans doute aurait-il mieux valu que celui-ci fût l’interlocuteur principal au vu du discours à venir du président de la CTC mais la Force en avait visiblement décidé autrement. Le Direx avait visiblement envoyé la grosse artillerie pour cette rencontre avec deux de ses cinq plus grosses fortunes personnelles en présence. Au moins ils prenaient visiblement ce sommet au sérieux et cela faisait plaisir à constater tout le chemin qu’avait pu parcourir l’Alliance Rebelle depuis ses modestes débuts.

Jim se tenait en face de ceux qui allaient juger de son exposé aujourd’hui. Il savait que cela serait plutôt peine perdue au vu de ce qu’on racontait sur les pratiques ignobles de l’ASC mais l’espoir faisait vivre. Il voulait essayer de se poser comme une voix de la conscience mais en utilisant les mots que les requins aiment entendre et c’est ce qu’il fit :

- Messieurs, tout d’abord merci de nous recevoir avec autant de considération. Je ne vois pas l’intérêt de perdre plus de temps en présentations, la réputation de chacun nous précède donc je rentrerai directement dans le vif du sujet.

Comme vous le savez, je dirige l’entreprise leader du marché de l’astronautique civil et de par le système politique de ma planète je siège au conseil d’Etat. J’ai donc une influence très importante sur le secteur corellien tout entier qui je rappelle représente près de 20% de l’économie du SurSecteur Zéro. Ceci étant dit, je pense que mes compétences en tant que chef d’entreprise n’ont pas besoin d’être justifiées plus que cela.

Je vais vous présenter ma façon de faire, celle dont nous avons intensifié la mise en place sur ma planète entière et qui je pense fera l’objet de cours d’économie dans toutes les bonnes universités de la galaxie. Je veux parler de responsabilité sociale des entreprises.

Il avait lâché les mots qui allaient sûrement faire grincer les dents de ses interlocuteurs mais plutôt qu’une bombe qui leur pèterai au visage, il voulait présenter cela de façon à ce qu’ils voient leur intérêt. L’Alliance préfèrerait un repentir ou une prise de conscience sur l’ignominie des méthodes corporatistes dans l’idéal mais cette utopie ne marcherait pas, même le plus idéaliste des dirigeants du gouvernement civil ne s’y essaierai pas. Ce qui importait c’était de bien montrer ce qu’ils y gagnaient eux, s’attarder sur le reste serait superflu. Il se lança donc sur un développement rapide :

- Les investisseurs tiennent de plus en plus compte de la politique sociale et environnementale des entreprises qu'ils inscrivent dans leur portefeuille de fonds. Une entreprise qui prend soin de ses salariés et de l’environnement est le signe d’une entreprise en bonne santé et qui se projette loin dans l’avenir. La responsabilité sociale des entreprises se traduit par des pratiques fondées sur des valeurs éthiques de respect de toutes les parties prenantes de l'activité de l'entreprise que ce soient les employés, les fournisseurs, les clients, les actionnaires ou les concurrents, mais aussi de la communauté via les collectivités locales, les associations de consommateurs ou les Organisations Non Gouvernementales, ainsi de l'environnement.

C’est beaucoup demander compte tenu de votre politique actuelle mais voilà ce que vous y gagnez : augmentation de vos performances commerciales et financières, réduction à terme des risques juridiques, industriels et économiques et enfin renforcement de la compétitivité.

Des exemples concrets : vous payez correctement vos employés ou vous leur proposez des primes au rendement ou un intéressement sur le produit de leur travail, ils sont plus heureux donc produisent plus et mieux mais ce n’est pas tout, on peut compter sur au moins 80% de retour sur investissement de l’argent reversé en consommation. Je dis 80% mais c’est sans doute un minimum en considérant qu’il y a très peu de chances que les populations du secteur corporatistes soient friandes de l’épargne et quand bien même ce serait autant d’argent que les banques pourraient réinjecter dans l’économie de toute façon. Autre point sur lequel j’aimerai comprendre un peu mieux votre façon de faire à certains sujets comme par exemple pourquoi empêcher toute progression sociale ou interne à l’entreprise alors que c’est la carotte de base pour appâter le travailleur ?

Je m’égare un peu mais je pense sincèrement que l’ASC, même si elle gère un des secteurs les plus riches de la Galaxie, pourrait faire encore mieux. Quand je vois ce que j’aurai à gagner à travailler avec l’ASC et ce que je pourrai faire gagner à l’ASC, je pense que ne pas investir ici serait une erreur. Voilà ce que je serai prêt à vous proposer : j’investis dans l’ASC en achetant une partie du capital disponible pour profiter des avantages que vous dispensez aux investisseurs et envoyer un de mes collaborateurs au Direx et je mets à votre disposition mes idées et mes moyens de faire plus de crédits. Je suis influent politiquement et j’ai un poids énorme dans l’économie galactique qui utilise mes vaisseaux pour tourner, je suis le candidat idéal pour renforcer l’ASC. Le seul inconvénient serait que j’ai des pratiques qui ne collent pas trop avec vos méthodes actuelles qui sont plus influencées par celles de l’Empire. Mais avec ma seule voix si vous ne me suivez pas, vous resterez toujours les seuls décideurs.

Maintenant réfléchissez une petite minute. Vous vous fichez royalement de la façon dont vous gagnez votre argent tant que vous en accumulez toujours autant si ce n’est plus. L’image que vous donnez au monde est importante et l’ASC se traîne une image assez moyenne avec ses méthodes. Moi je vous propose des idées pour arranger ça et renouveler ou se créer de nouveaux marchés, je peux rassembler les autres pôles économiques autour de l’ASC pour que les grands chefs d’entreprises de ce monde collaborent pour un meilleur contrôle de l’économie galactique. Il suffit juste de moraliser un peu certaines choses et de ne pas avoir peur d’investir pour avoir un retour sur investissement mais je ne vous apprends rien à ce sujet.

Voilà ce que j’avais à dire, que vous approuviez ou non personnellement ma vision des choses n’est pas vraiment ce qui importe au final si comme je le pense vous jugez que la fin justifie les moyens. Je vous propose la même fin voir une meilleure fin mais avec des moyens propres en plus. Si en plus d’être riches vous aviez une image ultra positive auprès de la Galaxie entière en faisant du social à la place de conditionner les gens et de les appauvrir, à votre avis à qui seront offerts les chantiers de reconstruction qui seront lancés aux quatre coins de la Galaxie une fois la guerre terminée ou les planètes libérées de l’emprise impériale ? Pensez à tout cela tranquillement et vous aurez l’occasion de m’en faire part via le Direx une fois que j’aurai investi dans 2 à 5% du capital de l’ASC pour y entrer.

Merci de votre attention.

Le corellien se redressa dans son fauteuil, prit le temps de se désaltérer après sa longue intervention puis se cala à nouveau entre les accoudoirs après un bref regard vers Mon Mothma pour essayer de voir sa réaction sur son intervention. Jim avait passé son message et il aurait le droit de s’exprimer encore auprès d’eux à l’avenir via le Direx une fois que son courtier aurait finalisé les opérations prévues. Parfois il suffisait d’une petite pierre pour construire le plus grand des édifices, l’ASC verrait-elle l’occasion qui se présentait à elle de compter dans le futur de cette Galaxie en travaillant avec l’Alliance Rebelle et ses chefs d’entreprises ? Seul l’avenir le dirait.

Estomaqués. Tel était le mot qui qualifiait le mieux l'état dans lequel se trouvaient conjointement Dak Tris, Kendral Noros et Semak Gep, devant le discours de Jim Antilles. Ce fut d'ailleurs ce dernier qui reprit le crachoir le premier.

[Semak Gep] -Nous brassions déjà des milliards de crédits, que vous n'aviez pas encore été sevré du sein de votre mère, monsieur Antilles. Je vous saurai donc gré de ne pas chercher à nous apprendre à gérer nos entreprises, aussi brillants soient vos bilans de fin d'année.

Le Céréen n'avait clairement pas pas apprécié que ce gringalet fraichement émoulu de son école de commerce à cent mille crédits le semestre se permette de lui donner des conseils de gestion interne, lui qui déjeunait régulièrement avec les chefs de gouvernements et les sénateurs les plus importants du secteur. Déjeuner n'était d'ailleurs pas le terme exact. Il s'agissait plus de séance sadomasochistes au cours desquelles le Président de Data & Stocks se plaisait à écraser ses vis à vis sous la puissance colossale de son entreprise, le tout réalisé autour d'un repas hors de prix payés par ses hôtes. Kendral Noros coupa alors le Céréen qui s'apprêtait à reprendre, le sourcil froncé et l'oeil haineux.

-Ce que voulait dire mon aimable confrère, c'est qu'aussi louables soient vos intentions, la ligne remarquable de conduite sur laquelle la CTC essaye de se tenir n'est pas réellement du goût de la plupart des investisseurs qui composent notre assemblée. Un sourire affable s'était affiché sur le visage de l'humain, alors que le Céréen, déjà bouillonnant semblait prêt à exploser comme une cocotte minute dont on avait oublié de faire diminuer la pression. Noros Reprit.
-Monsieur Antilles. Nous avons comme vous fait partie des plus grandes écoles de commerce, et avons, comme vous eu à connaître des mentors parmi les plus prestigieux que cette galaxie ait compté. Nous avons comme vous eu tout le loisir d'observer les turpitudes des âmes, quelle qu'aient été leur espèce. Et nous avons comme vous, appris la valeur de l'argent.
Mais contrairement à vous, Monsieur Antilles, rares ici sont ceux qui ont eu le plaisir d'accéder au responsabilité par le simple fait de leur naissance au bon endroit, au bon moment. Vous ne dirigez pas la Corporation Technique Corellienne parce que vous avez l'étoffe d'un chef d'entreprise, mais parce que vous avez le bénéfice d'être un héritier. Et, si cela vous permet le luxe de passer du temps à réfléchir sur le moral de vos ouvriers, sur la verdeur de l'herbe de votre planète, et sur la qualité de l'air autour de vos usines, sachez que nous préférons largement nous concentrer sur la capacité de nos sociétés à rester leaders sur des marchés hautement concurrentiels. Alors oui, la Corporation Technique Corellienne est un exemple d'entreprise absolument remarquable et nous ne doutons pas que bien au chaud du côté du Noyau, vos ouvriers ne manquent de rien, et qu'ils viennent au travail le sourire au lèvre. Mais comprenez bien qu'ici, dans le Secteur Corporatif, le bonheur n'est pas un droit. Ce que vous voulez, il faudra venir le chercher. Et pour autant que je sache, aucun de mes employé n'est jamais venu se plaindre de ses conditions de travail.

Le cynisme à l'état pur. En effet, dans le Secteur Corporatif, rares étaient les courageux qui osaient se dresser contre un système basé sur le développement inégal et combiné. Loin de toute législation, la puissance des entreprises Corporatives avait dépassé celle des états. Sur de nombreux mondes, le Direx avait obtenu jusqu'à l'interdiction pure et simple de la création de syndicats de travailleurs. Les peines encourues étant des plus dissuasives, l'envie des ouvriers de se rassembler avait laissé place à une atomisation complète au sein des couches sociales inférieures, alors que les grands patrons se serraient les coudes pour augmenter sans cesses les avantages liés à leur fonctions. De plus l'Operationnal Multisystem Management, le tout puissant Big Brother à la bote du Direx s'ingéniait à débusquer les sections syndicales clandestines et à s'assurer qu'elles ne puissent plus jamais nuire à l'ordre établi. Le vérouillage était total.
Quant à l'environnement, ce mot n'évoquait pas même une vague idée aux trois PDG. Bien sûr, ils ne se privaient pas d'aller visiter les sublimes plages de Kattada, ou d'aller observer les flots infinis de Manaan, du haut de leurs penthouse privatifs, et trouvait admirable qu'il existe encore des coins de paradis dans ces systèmes. Mais, lorsque l'on vivait sur Télos, ou Bonadan, deux des principaux mondes du secteur, dont l'industrialisation à outrance rapportait chaque jour des centaines de millions de crédits, il était difficile de concevoir qu'une prairie remplie de bantha gambadant pouvait générer une quelconque source de profit. A moins bien sûr d'y construire une tour de trois-cents étages, d'y installer des milliers de bureau, de créer un système de grille magnétiques couteux en énergie pour fluidifier le transport atmosphérique des alentours.
Les préoccupations humanistes de Jim Antilles étaient donc bien loin des considérations pécuniaires du Muun, du Céréen et de l'Humain.
Dak Tris reprit à la suite de Noros.

-Sénatrice Mothma, c'est précisément de ce type de petits désagrément, qui constituent déjà les premiers points d'achoppement entre nos deux projets, pourtant si similaires.
Nous n'aimerions pas que nos actionnaires, et ils sont nombreux, se voient importunés par ce genre de considérations... superflues. Dak Tris ne s'était pas résigné à employer le mot éthique, bien qu'il en connût la définition. La sienne semblait toutefois fort différente de celle de Jim. Les dents pointues du Muun réapparurent au coin d'un sourire forcé. Le Direx n'est pas tout à fait prêt à s'engager sur des voies que beaucoup de ses membres, moi y compris jugent hasardeuses, bien que nous ne doutons pas de la franche réussite des méthodes de Monsieur Antilles sur Corellia.
Comme vous le savez, nous sommes des entrepreneurs, et nous savons prendre des risques. Et à ce propos, le Direx considère qu'il en prend déjà suffisamment en vous contactant, et en vous proposant une aide substantielle importante. Aussi aimerions nous obtenir la garantie que, dans l'éventualité où nous serions amenés à nous... recroiser, rien ni personne ne viendrait interférer dans la gestion que le Direx fait de ses capitaux, ni plus généralement dans la politique de l'Autorité du Secteur Corporatif.

Malgré quelques tournures alambiquées, le message paraissait plutôt clair. La porte du Direx n'avait nullement été fermée à Jim Antilles et à sa Corporation Technique Corellienne, mais ses méthodes, si elles n'étaient pas pas désaprouvée pour ce qui le concernait, n'étaient certainement pas prêtes d'être gravée dans le marbre du code de conduite des investisseurs déjà en place.

Un silence gêné plana quelques instant après que Mon Mothma eut terminé son discours. Les trois investisseurs du Direx se regardèrent quelque peu interloqués. Ils n'étaient pas sûrs de bien comprendre ce que venait de dire la chandrillienne, ni quelle était sa logique. Sous prétexte de chérir la liberté, elle préférait ne pas accepter le soutien financier du Direx, pour venir à bout d'un Empire Tyrannique, sous prétexte qu'il demandait trop de liberté ? Voilà qui n'entrait pas dans les schémas de pensée du trio de patrons. Le Muun reprit donc la parole.

-Je crois qu'il y a un malentendu sénatrice. Mais il n'eut pas le temps de finir, Semak Gep, hors de lui l'interrompit, tonitruant.
-ÉVIDEMMENT QU'IL Y A UN MALENTENDU ! QUE POUVIONS NOUS ATTENDRE DE CE GENRE DE PERSONNE ! JE VOUS AVAIS BIEN DIT QU'IL N'Y AVAIT RIEN A ATTENDRE DE CE GENRE D'INDIVIDUS !! REBELLES DE PACOTILLES !!

A côté de lui, Kendral Noros avait porté ses mains à ses oreilles pour les protéger de la déflagration de décibels que le Céréen avait généré.

-Inutile de s'énerver à ce point Gep. Il doit sans doute y avoir un moyen de régler ce malencontreux accrochage. Le coupa t-il toutefois, avant de reprendre, le visage nettement plus crispé que lors de sa première intervention. Sénatrice, Monsieur Antilles. Je crois que vous ne mesurez pas totalement l'ampleur des bénéfices que pourraient nous apporter mutuellement la coopération que le Direx envisage. Le Direx a les moyens de mettre en route une fantastique machine de guerre à votre seul service. Nous avons les capacités de productions suffisantes pour mettre sur pied des flottes de combats et de soutien entière, et tout ça gracieusement. En échange, votre Alliance s'assouplira sur les questions de gestions de ressources humaines dans les secteurs sous contrôle de l'ASC. Nous avons bien conscience que nous n'avons pas exactement les mêmes préoccupations sur ce terrain là, mais, en considérant ceci comme un moindre mal, vous pourriez faire bénéficier la galaxie tout entière des bienfaits que vous prétendez apporter. Et puis... la démocratie que vous aimez temps n'est-il pas un régime de compromis ?

Et une louche de cynisme supplémentaire. A ce petit jeu, Kendral Noros était très fort. Justifier le maintien, et même le renforcement du totalitarisme financier du Direx par l'amour de la démocratie. Il n'en était pas peu fier de celle-là. Si Mothma décidait de revenir sur ses position, nulle doute qu'il irait faire étalage de sa finesse devant les autres investisseurs. Dak Tris reprit alors la parole.

-Sénatrice, vous avez longtemps siégé au Sénat et je pense pouvoir faire confiance dans votre vision sur le long terme. Vous et moi sommes des gens de parole, et dans nos métiers, qui dit parole dit souvent, contrats... accords, traités. Je ne doute pas que vous soyez tout à fait au fait de l'importance de ces choses là et du respect qui leur est du une fois qu'ils ont étés entérinés...

Pour quelqu'un avait annoncé vouloir parler de manière franche et sans circonvolution, Dak Tris se montrait bien mystérieux. Déformation professionnelle sans doute, à moins bien sûr, qu'il ne se fût agi d'une manière élégante de vouloir forcer la main à la Chandrillienne et à ses collaborateurs...

Dak Tris releva ses petits yeux, profondément enfoncés dans ses orbites vers ceux de Mon Mothma. Le mépris le plus complet pouvait s'y lire, de même que la méchanceté naturelle qui le caractérisait.

-Eh bien sénatrice. J'espère que vos valeurs sont solidement blindées. Les croiseurs Impériaux sont armés d'armes tout à fait tangibles, elles.

Sa voix s'était presque transformée en un râle morbide. Le Muun n'était sans doute pas près de se remettre de l'affront qu'il venait de subir de la part de cette petite politicienne. Qui était-elle pour refuser l'argent du Secteur Corporatif ? Ne comprenait-elle donc rien ?
Gep, Noros et Tris se levèrent donc sans aucune autre forme de politesse. Si l'Alliance Rebelle se refusait à les aider dans leur lutte pour l'indépendance, alors qu'ils se proposaient pour l'aider, et tout ça pour quelques scrupules moraux, alors ils devraient trouver d'autres alliés, plus dociles, et moins regardants sur les méthodes.
Les longs doigts osseux du Muun se refermèrent sur un Datapad, alors que Kendral Noros adressait un au revoir glacial à Mothma et à sa délégation. Il pianota quelque chose, puis, se retourna d'un mouvement sec. Direction la Baie d'amarrage, et Bonadan. Si les négociations avaient échoués, ils n'avaient plus de raison de rester dans le système Deltooine, à l'abri des regards. Ils avaient suffisamment perdu de temps comme ça, et il était grand temps de revenir aux affaires...