Un long silence suivit l'envoi du message sans qu'aucun accusé de réception ne parvint dans les hauts parleurs de la passerelle, les deux astronefs de patrouille, lents, issus de la production locale, avançaient toujours. Ne les avaient-ils pas repérés sur leurs instruments ou cachaient-ils les vraies performances de leurs capteurs ? L'on ne le saurait que si cela tournait mal..
-Êtes-vous humains ?
Le traducteurs automatique n'arrivait même pas a masquer le côté intéressé de la question...
-Nous sommes des membres d'une mission diplomatique et commerciale de la Fédération du Commerce.
Les deux patrouilleurs du réseau d'alerte avancée modifièrent leur trajectoire, elle n'était plus d'interception.
-... Autorisation de poser à usine capitale du Nid de Création Colicoïd, l'on vous recevra.
Les deux astronefs s'approchèrent de la planète à vitesse de croisière sur ces paroles équivoques. Se poser ici avait toujours été risqué, c'était connu. La Myria et l'Exia pénétrèrent dans l'atmosphère (aux normes humaines heureusement) et rejoignirent les airs d'atterrissage, aux formes étranges en rupture avec les standards humains, l'extérieur du Nid ne laissait rien envisager de l'intérieur malgré quelques fumées et vapeurs symptômes de toute zone industrielle qui se respecte...
Mordred descendit avec Fla'ar et deux autres membres d'équipage, trois autres silhouettes les accompagnaient, dont un enfant très visiblement... Les mandibules des gardes s'agitèrent lorsqu'ils virent les trois capes mais leurs ordres devaient être strictes : ils ne firent rien de plus. Jetant quelques regards en coin Mordred emboita le pas des gardes, les deux astronefs avaient gardés les mitrailleuses de train sous tension et si les radars de tir des astrocanons étaient désactivés, tirer sans sur le Nid ferait autant de dégât vu la distance qui séparait les pièces des grandes infrastructures. Cela restait une piètre consolation à l'idée qu'il pourrait se faire manger dans les heures voir minutes qui allaient suivre.
Comme toute planète sur laquelle l'on venait de déarquer; Colla IV empestait, à un point encore plus important qu'ailleurs : sa population était non humaine. L'esprit de Mordred était trop occupé pour apprécier l'architecture locale, relevant plus de l'art abstrait qu'une construction logique et utilitariste d'un point de vue humain. Le chemin fut long, et parfois abrupte, la Cité avait été conçue pour les locaux, pas les bipèdes humains, les galeries étaient basses et le sol était lisse, les colicoïdes ayant l'habitude de rouler... "L'escorte" s'arrêta enfin dans ce qui semblait être l'entrée d'une alcôve. Mordred entra et tomba sur une autre galerie. Les lieux étaient tellement étranges qu'il aurait du mal a trouver la sortie en cas de pépin, constata-t-il amèrement en poursuivant sa route, les autres à sa suite, l'escorte était restée derrière, une autre prenait la relève, l'on avait visiblement atteint ce qui pourrait être considérer comme des quartiers de haute sécurité...
La nouvelle escorte les mena dans une salle de taille moyenne, suffisante pour faire tenir quelques dizaines de personnes sans toutefois atteindre la centaine, sept colicoïdes attendaient.
-Vous êtes donc humains, la Fédération n'a plus de droîds négociateurs ? Les mandibules des sept créatures s'agitaient, et Mordred n'avait qu'une vibrodague cachée comme arme...
-Pas pour les affaires importantes, excellence. Je me nomme Maynard Leegsen, je suis dument mandaté par la Fédération comme l'attestent ces documents.
Les mandibules bougèrent moins vite, le plus gros colicoïde répondit...
-C'est donc une affaire importante ? La dernière négociation n'a pas donné de résultats... Je n'ai pas besoin que vous approchiez ces documents plus près.
-La Fédération du commerce est toujours intéressée par vos très efficaces robots de combat droïdeka et Sporpeneks.
-Et en quelles proportions ?
-Le Vice-Roi que je représente m'a parlé d'une possible commande de plusieurs centaines de milliers de robots de combat.
Le Colicoïde se tut, les mandibules s'agitèrent a toute vitesse, la conversation était animée, quelques pinces claquèrent même.
-Comment comptez-vous payer ?
-Quelle serait la formule qui conviendrait le plus aux colicoïdes ?
-De la chair ! , glapit le traducteur automatique, les pinces et autres mandibules claquèrent dans les airs.
-De la... chair pourrait vous être fournie, nous avons entendu dire que celle des humains était la plus tendre à votre bouche. Nous avons apportés quelques spécimens, actuellement sous neutralisant mécanique... Nous pouvons vous en fournir quelques uns en cadeau disons... personnels. Un paiement intégralement en... chair nécessiterait cependant l'aval de ceux qui m'envoient, cela représente plusieurs milliers d'individus.
-C'est une excellente base... autre chose ? Leur odeur est appétissante...
-Oui. Les implications sécuritaires de la Fédération sont toujours plus importantes, elle désirerait être en mesure de réparer ses unités sur le terrain en cas de besoin. Les.. hum.. les plans des machines de combat seraient utiles a ce niveau.
Grand silence, quelques mandibules bougèrent sans davantage d'activité.
-Combien d'unités vous vouliez commander ?
-Trois millions de droïdeka et sept cent mille Scorpeneks
Nouvelle agitation de mandibules.
-C'est un grand nombre, nous pourrions envisager de vous céder les plans mais... cela coutera un peu plus cher... Nous sommes également peu intéressés par le crédit galactique...
-Je transmettrai a mes employeurs, nous trouverons très certainement un arrangement... Maintenant je ne sais si vous désirez profiter de votre.. apéritif avant que nous discutions des termes du contrat... hormis son mode de paiement bien entendu.
Les insectes regardèrent les trois humains qui avaient été avancés devant eux, l'enfant passa le premier. Mordred serra les dents en fixant un point indéterminé de la salle. Les deux marines pris avec lui étaient les plus endurcis de l'équipage l'un d'eux émis un petit bruit sourd lorsqu'une des créatures s'attaqua à la tête du gosse. Les deux autres esclaves achetés restaient stoïques, paralysés par les inhibiteurs de comportement mais témoins muets de la scène... Une trentaine de minutes plus tard, l'un des colicoïdes leva la tête en suçant ses mandibules et déclara :
-Nous préférons celui d'âge moyen, l'autre est flasque et le jeune est acide. À présent discutons...
La discussion dura plusieurs heures, sur des chicanes. Mordred qui n'avait jamais mené de négociations de cette ampleur, surtout après un banquet improvisé but sur quelques termes mais n'éveilla pas le doute. Une pré-série de quelques unités, payée en chair humaine devrait être prête pour son retour selon le contrait préliminaire mit au point. Il espéra ne plus jamais avoir a faire une chose pareille. Enfin après près de trois heures de discussions ils quittèrent enfin les lieux, beaucoup plus vert de gris qu'avant... Le chemin fut long et pénible, l'air "frais" n'arrangera rien...
À peine arrivée dans l'astronef, la "délégation" régurgita de tout son saoul tandis que les deux vaisseaux s'arrachaient lentement a la gravité locale. Fla'ar ôta ses vêtements et alla se reposer, le second de la section tactique du Myria sortit un microordinateur ainsi que les capteurs passifs acquis pour des centaines de milliers de crédits des coutures et des vêtements, Mordred ôta les siens. Dans quelques heures et pendant les jours qui suivraient, un long travail de décodage des odeurs et signaux hormonales colicoïdes et humains (qui avaient quand même été enregistrées malgré les philtres). Un long travail de création et de production artisanale d'odeurs susceptibles d'agir sur les colicoïdes devrait alors être fait, et il était probable que du futur matériel devrait être acquis pour cela, où qu'il faudrait faire appel a des laboratoires privés peu regardants...
Quoiqu'il en soit il y avait largement plusieurs jours de délais pour réaliser tout cela. Et Mordred avait sommeil, et aucune envie de se réveiller ; le réveil étant synonyme de négociations pour fournir un nouveau gouter à des fourmis géantes...
Etape 1 donc, le vrai boulot viendra avec la suite.