[Hege - Aiya Mogal'n] Voudriez vous manger du poulpe ?

AAAAMalgré l'heure avancée du jour sur Mandalore, la pièce était plongée dans les ténèbres. De maigres rais d'un soleil printanier donnaient juste ce qu'il fallait de lumière pour distinguer le contour des formes. L'intérieur de cette chambre était d'un sobriété spartiate. Une armure mandalorienne de couleur sombre était montée sur un mannequin à proximité de la fenêtre. Le rebord d'un verre vide accrochait néanmoins une perle de clarté et répercutait celle-ci à travers la pièce.

AAAAQuelques coups frappés doucement à la porte rompirent le silence pesant qui régnait dans la pièce. Bien qu'aucune réponse n'émana de l'intérieur, le loquet tourna et un visage féminin risque un regard par l’entrebâillement. Un mince courant d'air se créa, faisant virevolter un peu de poussière dans les rayons de lumières des stores presque clos.

- Aiya ? demanda la voix encore adolescente de Nayila, son amie. Tu es là ? ... tu as un appel via l'holonet. Crypté, et urgent.

AAAADe son assise, où elle se tenait droite et silencieuse, Aiya Mogal'n fit un signe discret de la main. Il signifiait clairement qu'elle ne voulait pas y répondre.
Nayila fit mine de reculer, mais hésita. Puis, d'un pas mal assuré mais brave, elle entra. Elle vint s'accroupir auprès de la mandalorienne, en restant à distance raisonnable.

AAAAAiya était revenue ainsi de l'expédition sur Christophsis. Murée dans le mutisme, repliée sur elle-même. Elle avait participé aux cérémonies funéraires de ses frères d'armes, Asht'tao et Monatarion, dont elle avait rapatrié les corps sur Mandalore. Depuis, a part les formules de politesses et les instructions aux jeunes mandaloriens dont elle participait à l'entrainement, rien ne filtrait entre ses lèvres.
l'Elomin se contentait depuis de s'entrainer quotidiennement, de manger, de participer aux opérations pour lesquelles le clan la sollicitait, et le reste du temps elle le passait enfermée dans sa chambre.
Même si elle n'en disait rien, Nayila savait que depuis un an et demi que cette tragédie c'était produite, Aiya n'avait trouvé la paix. Elle dormait mal, quand elle arrivait seulement à trouver le sommeil. Elle se réveillait souvent en proie à des cauchemars dont elle ne parlait à personne.

AAAALa jeune fille prit une grande inspiration, puis commença a parler :

- Aiya, ce n'est plus tenable. Tu ne va pas passer l'éternité à te laisser dépérir ? Tu n'est pour rien dans la mort de tes compagnons. Je sais ce que ça a pu être comme déchirure, et je l'ai moi-même vécue.
AAAAElle rougit, hésitant à continuer, mais maintenant qu'elle était lancée, elle ne voulait pas s'arrêter.
- Tu sais ... avant que vous ne partiez et que vous décrochiez cette mission, j'avais ... tout juste eu le temps de ... enfin, tu sais, j'avais toujours trouvé Monat' craquant à souhaits. Juste avant que vous ne partiez, j'avais ... enfin ... on s'était embrassés.
" Je n'aurais jamais cru que Monat' aurait jamais pu être aussi gauche. a croire que j'avais aspiré toute sa belle assurance au passage. Enfin, voilà, on ne s'était même pas vraiment dit "je t'aime". Et je n'en aurait jamais l'occasion finalement.
" Mais j'ai fait mon deuil, car si j'avais commencé à me replier alors que je n'avais même pas 17 ans, ç'aurait été compliqué, tu ne crois pas ? Je voudrais juste que tu te reprenne, et te voir sourire à nouveau. Te voir grincer quand je fait une faute de calcul minable ... ou manger de bon cœur, comme à l'époque.

" Je sais que c'est dur, mais tu est une mandalorienne, non ? Tu vaux mieux que ça, mieux que de finir par dépérir de chagrin. Et même si tu pense que tu ne vas pas y arriver seule, sache que je suis là. Et que d'autres seront là pour t'aider, si tu fait le premier pas.

AAAAElle avait terminé. Plusieurs longues secondes s'écoulèrent pendant lesquelles Nayila détailla la tenue de son amie : sa jupe légère, sa tunique courte, son voile sur les épaules. Elle vit même une larme accrocher la lumière sur sa joue, avant qu'elle ne roule. Elle pu distinguer au passage sa pommette, dont l'excroissance osseuse saillait étrangement à présent, car l'Elomin ne se taillait plus vraiment les cornes. Elle lui couronnait le visage d'une manière lugubre.
Tandis qu'un frisson parcourait l'échine de l'humaine, elle se décida à terminer leur entretien.

- Je doit te laisser ce transmetteur. Un client qui cherche à te contacter, et qui a réussi à te trouver jusqu'ici. Une proposition "qui ne se refuse pas", a-t-il dit. Et il te voudrait toi plus que quiconque sur cette opération, même si il n'a pas voulu m'en dire plus.

AAAAElle déposa l'appareil sur la table basse devant Aiya, en ajoutant : "Asht' et Monat' auraient voulu que tu prenne ce genre d'affaire. Pour t'y accompagner sans aucun doute, mais surtout parce qu'il n'y a que comme ça que vous exploitiez vos talents.
" Bonne soirée, Aiya."

AAAAAlors qu'elle se retournait, une main chaude mais fébrile se saisit de la sienne. La poigne était encore ferme, mais se voulait douce. Nayila la serra en jetant un coup d’œil à son amie, puis s'éclipsa en fermant la porte derrière elle.

AAAAAiya resta encore une dizaine de seconde assise et immobile dans la pièce. Sa respiration lente tentait de se reprendre, loin des émotions qu'Aiya considérait comme privées.
Enfin, elle se saisit tu transmetteur holographique, se redressa, puis appuya sur l'interrupteur.
Un grand droïde apparut devant elle dans l'aura bleuté de la transmission. Elle inspira une goulée d'air avant d'articuler :
- Navré d'avoir dû vous faire patienter. Vous vouliez me parler ?

AAAAElle écouta Hege lui présenter l'affaire, sans broncher, sans l'interrompre, et digéra les informations.
Liquider un criminel et ses hommes de mains, sans témoins, avec fourniture d'un contingent armé et d'une puissance de feu considérable, le tout payé une somme folle, mais somme toute en concordance avec les risques d'une telle mission ...
Mais surtout une mission qui faisait appel à ses compétence de tacticienne autant que de combattante. Qui que puisse être son client, il devinait bien comment l'intéresser.

- Il n'y aura que les sbires de Vekker sur le terrain ? Mon clan, et donc moi a fortiori, n'aimons pas massacrer des innocents.
De plus, j'aimerais bien connaitre l'identité de mon commanditaire. Bien que je comprenne que cela ne puisse peut-être faire partie de l'arrangement, pour une simple question de sécurité personnelle.

AAAAElle laissa à son interlocuteur le temps de lui répondre. Elle n'avait pas laissé sous-entendre une réponse, et elle espérait que son émoi était parfaitement contrôlé, malgré les mois passés sans entretenir de vrais échanges avec qui que ce soit.

AAAAAiya prit quelques dizaines de secondes pour écouter le droïde s'exposer en auto-entrepreneur et volonté maitresse de la chute d'un criminel de toute évidence d'envergure, au vu des moyens qu'il déployait pour y parvenir.

AAAAMais la proposition se tenait. Des millions de crédit, dont un en avance, cela lui permettrait de payer enfin le vaisseau qu'elle voulait payer a son groupe avant la tragédie de Christophsis. Le vaisseau de Nayila, pour ses 18 ans, son baptème mandalorien (même si elle refusait encore d'être considérée comme telle, la chipie).
Cette simple évocation de ce vieux projet eut raison des dernières réticences de la mandalorienne.

- Cela est bien plus que satisfaisant, monsieur. J'aurais même accepté sans la promesse de prime de délai. Mais soit, j'accepte. Fournissez moi le maximum d'informations dont vous disposez sur la cible, sa villa, et son organisation. Ou le contact de quelqu'un à même de me renseigner de façon satisfaisante. Et vous pourrez considérer cette affaire comme d'ores et déjà réglée.

AAAAElle se leva et émit un sifflement dont la vibration fit réagir le système électronique. Les stores s'ouvrirent, et la pièce s'illumina. Hege pouvait découvrir le visage de son interlocutrice, sur lequel un sourire carnassier était apparu, rendant le faciès de l'Elomin particulièrement morbide, avec ses cornes, ses traits tirés et ses yeux dépourvus de pupille.

AAAATandis qu'elle se dirigeait vers son armure, reforgée en partie depuis sa destruction complète sur Christophsis, elle demanda à son commanditaire : "D'autres exigences, mon Prince ? vu le prix que vous me proposez, vous pouvez vous permettre une petite excentricité ..."

Versement : 1 millions de crédits sur le compte en banque d'Aiya Mogal'n